Paris : Un regard de l’intérieur Le temps d’un week-end je suis allée en plein cœur de la capitale
Partie pour retrouver des amis, j’ai saisi cette occasion pour observer à quoi ressemble la vie parisienne, 3 semaines après les attentats du 13 novembre.
![[figure 1 : fresque collective]](https://static.wixstatic.com/media/5d2ec5_8a2015fda5f24b8787231d41d227ceec.jpg/v1/fill/w_960,h_592,al_c,q_85,enc_avif,quality_auto/5d2ec5_8a2015fda5f24b8787231d41d227ceec.jpg)
Mon voyage en destination de Paris a plutôt mal commencé. D’abord, le covoiturage réservé ne s’est jamais présenté. Après avoir cherché pendant une demi heure j’ai pris la décision d’en réserver un autre en urgence. Me voilà embarquée dans une petite Fiat 500 avec trois autres filles. A l’approche de la frontière, des bouchons sur plus de 3 kilomètres et les camions sont immobilisés. Les frontières sont bel et bien revenues.
Avec les attentats et la COP 21, les forces de l’ordre sont tendues. Et on peut comprendre que les contrôles à la frontière franco-belge posent des soucis. Mais faire 3 kilomètres en une heure à cause d’un barrage de policiers, fumant des cigarettes et dévisageant tous les conducteurs les uns après les autres, paraît bien peu de chose comparé aux embouteillages que cela crée. Arrivée aux abords de Paris. Sur le phérique bouchonné, un nombre insensé de véhicules de police slaloment entre les voitures à toute allure. Pas facile quand on n’est pas habitué.
![[Figure 2 : Quai des Jemmapes. Photo de Julie Jacquet]](https://static.wixstatic.com/media/5d2ec5_8d40781edab54bb3a6dd679ee8d68937.jpg/v1/fill/w_980,h_653,al_c,q_85,usm_0.66_1.00_0.01,enc_avif,quality_auto/5d2ec5_8d40781edab54bb3a6dd679ee8d68937.jpg)
Fluctuat nec mergitur, la devise latine de Paris : « Il est battu par les flots, mais ne sombre pas »
Je passe la soirée avec un groupe d’amis. Tous sont nés et ont grandi à Paris. Le Petit Carillon, un des restaurants attaqués, est à deux pas de l’appartement de mon amie, place du colonel Fabien. C’est son restaurant préféré. Pourtant maintenant elle évite de passer devant. « C’est encore trop tôt » dit-elle. Dans la rue, on n’a pas l’impression qu’un tel drame est arrivé. Les gens ont le sourire aux lèvres. Ils sont assis en terrasse et profitent du soleil. Mais quand on les écoute, on comprend. Mon amie me raconte ses dernières aventures. Ca fait longtemps qu’on ne s’est pas vues, et beaucoup de ses phrases sont ponctuées de « avant les attentas » ou « après les attentats ». C’est un peu comme quand en histoire on situe les événements par rapport à la naissance de Jésus Christ, il y a un avant et un après. Pour les parisiens surtout, cette date est devenue une référence.
Pourtant, il n’y a pas un parisien que je connaisse qui ait changé ses habitudes. Ne pas réussir à passer devant ces lieux devenus symboliques est une chose. Ne plus sortir boire un verre avec ses amis dans les bars du 10ème en est une autre. A Bruxelles, la vie s’est arrêtée pendant plusieurs jours. Les évenements culturels ont été annulés, les écoles fermées et les transports stoppés, tout était comme figé. Mais la vie a repris, tout comme à Paris, les perquisitions et la surveillance militaire en plus. C’est ça qui fait peur maintenant. La présence militaire, les contrôles abusifs sous prétexte d’état d’urgence. Le deuil se fait, le temps passe et nos droits diminuent pour notre « sécurité », avec notre consentement.
Paris reste Paris. Si pas de mémorial classique, les graffeurs parisiens s’en chargent. De belles fresques ont été faites de part et d’autre de la capitale [voir figure 1] où dans les lettres, les lieux des attaques sont inscrits. Des messages de paix apparaissent sur les murs. Parce qu’ils ne nous enleverront jamais ça.
Jamais, notre liberté et notre envie de sortir faire la fête
Jamais, notre joie de vivre, notre peur
Jamais ils ne l’auront !